Planck dévoile l’empreinte magnétique de notre Galaxie
Le champ magnétique de la Voie Lactée est révélé dans une nouvelle carte livrée par la mission Planck de l’Agence spatiale européenne. Cette image est issue des premières observations sur l’ensemble du ciel de la lumière polarisée émise par la poussière interstellaire de notre Galaxie.
La lumière est une forme d’énergie qui nous est très familière même si certaines de ses propriétés ne sont pas facilement accessibles. L’une d’entre elles - la polarisation - est une source d’informations pour les astrophysicien(ne)s. Dans l’espace, la lumière émise par les étoiles, le gaz ou la poussière peut être polarisée de diverses façons. En mesurant la polarisation de la lumière, les astronomes peuvent étudier les processus physiques qui sont à son origine. En particulier, la polarisation révèle l’existence et les propriétés des champs magnétiques dans le milieu interstellaire de notre Galaxie.
La carte présentée ici a été obtenue en utilisant des détecteurs du satellite Planck de l'ESA, qui a observé de 2009 à 2012 l’ensemble de la voûte céleste dans neuf bandes de fréquence dans le domaine submillimétrique, entre l’infrarouge lointain et la radio. Les données de l’instrument haute fréquence HFI ont été essentielles pour ce résultat sur le champ magnétique. Cet instrument a été conçu et assemblé sous la direction de l’IAS avec un financement du CNES et du CNRS.
L'analyse des données de polarisation de Planck est un axe majeur de recherche pour l'équipe Matière interstellaire et Cosmologie de l'IAS, au sein du consortium Planck. Plusieurs chercheurs permanents y travaillent ainsi que les jeunes chercheurs financés dans le cadre du projet ERC MISTIC. L'équipe de l'IAS souhaite se servir de la polarisation de l'émission de la poussière interstellaire pour décrire l’interaction entre le champ magnétique, la turbulence et la structure du milieu interstellaire. Pour cela, il faut faire la part des choses entre les propriétés de polarisation de la poussière, les mécanismes d’alignement des grains, et la structure du champ magnétique. Le travail d’interprétation s’appuie sur la comparaison entre données et simulations numériques MHD de nuages interstellaires. L'équipe développe également une modélisation physique de la polarisation de l’émission de la poussière.
Le champ magnétique de la Voie Lactée vu par le satellite Planck, dans le canal à 353 GHz de l'instrument HFI. Les régions les plus sombres correspondent à une émission polarisée plus forte et les stries indiquent la direction du champ magnétique projeté sur le plan du ciel. Crédits : ESA - collaboration Planck
Les tourbillons, boucles et arches de cette image tracent la structure du champ magnétique de notre Galaxie. La bande sombre correspond au plan galactique : l’émission polarisée y est particulièrement intense. La structure générale révèle un motif régulier à grande échelle où les lignes du champ magnétique sont majoritairement parallèles au plan de la Voie Lactée.
Les données révèlent également des variations de la direction de polarisation dans les nuages de matière proches du Soleil vus de part et d’autre de la bande sombre. Là les observations témoignent de changements dans la direction du champ magnétique dont les astrophysiciens étudient l’origine.
Les zones à haute latitude galactique ont été masquées. Le signal y est plus faible et un travail supplémentaire est requis pour mesurer et séparer la polarisation de notre Galaxie de celle du rayonnement fossile micro-onde.
Au-delà de notre Galaxie
L’intensité du rayonnement fossile a été cartographiée avec une précision sans précédent par Planck et aujourd’hui les chercheurs scrutent les données pour mesurer la polarisation de ce rayonnement. C’est l’un des objectifs principaux de la mission Planck car cette polarisation pourrait révéler la présence d’ondes gravitationnelles primordiales générées par l'inflation, juste après la naissance de l’Univers. Les objectifs galactique et cosmologique sont étroitement liés car aux fréquences couvertes par Planck en polarisation, les deux émissions sont mêlées.
En mars 2014, les scientifiques de la collaboration BICEP2 ont annoncé la première détection d’un tel signal dans les données collectées par un télescope au sol observant une petite fraction du ciel (1%) à une seule fréquence. Leur résultat repose sur l’hypothèse que la polarisation de l’émission d’avant-plan de notre galaxie est négligeable dans cette région.
D’ici la fin de cette année, la collaboration Planck livrera ses données basées sur les observations de tout le ciel faites par le satellite Planck dans les sept bandes en fréquence où les détecteurs sont sensibles à la polarisation de la lumière. Ces mesures multifréquences devraient permettre aux astrophysiciens d’estimer et de séparer le signal polarisé primordial et le signal d’avant-plan de notre Galaxie. Cette étude permettra une investigation bien plus détaillée du début de l’histoire du cosmos, depuis son expansion quand l’univers était âgé d’une toute petite fraction de seconde jusqu’à la naissance des premières étoiles, plusieurs centaines de millions d’années plus tard.
Contacts à l'IAS:
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François Boulanger (polarisation): francois.boulanger @ ias.u-psud.fr -
Jean-Loup Puget (Planck): jean-loup.puget @ ias.u-psud.fr
Liens:
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Communiqué de presse ESA
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Les 4 premiers articles sur la polarisation galactique, qui viennent d'être soumis au journal Astronomy & Astrophysics:-
Planck intermediate results. XIX. An overview of the polarized thermal emission from Galactic dust -
Planck intermediate results. XX. Comparison of polarized thermal emission from Galactic dust with simulations of MHD turbulence -
Planck intermediate results. XXI. Comparison of polarized thermal emission from Galactic dust at 353 GHz with optical interstellar polarization -
Planck intermediate results. XXII. Frequency dependence of thermal emission from Galactic dust in intensity and polarization
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