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Nouvelle découverte d’un proto-amas de galaxies très actif, datant de quand l’Univers avait 3 milliards d’années

26/10/2021 - 23:45

Un "proto-amas" de galaxies datant de l'époque la plus active de l'Univers a été découvert. Il forme intensément des étoiles, à un rythme élevé peu compatible avec les modèles actuels, et il devrait évoluer en un superamas de galaxies.
 
Les proto-amas de galaxies sont des ensembles de galaxies très jeunes en cours de rapprochement sous l’effet de la gravitation et qui vont donner naissance aux plus grandes structures gravitationnelles connues : des amas de galaxies dans l'univers proche. La compréhension des mécanismes de formation à l’œuvre au sein de ces structures pourrait s’avérer précieuse pour appréhender l’histoire et la structuration de l’Univers. Les résultats des travaux de l’équipe internationale (France, Italie, USA, Japon), présentés dans deux publications, fournissent ainsi des informations essentielles sur les propriétés de ce proto-amas baptisé PHz G237.01+42.50 (ou G237 en abrégé) et des galaxies qui le composent.
 
G237 est le premier proto-amas confirmé par spectroscopie, issu d'un échantillon de plus de 2 000 candidats identifiés par Planck, le satellite de l’ESA lancé en 2009 pour sonder le fond diffus cosmologique et développé en grande partie à l’IAS. Cet échantillon complémente à plus grand redshift (décalage vers le rouge) celui des amas de galaxies plus proches détectés par effet SZ par Planck. G237 est vu alors que l’Univers avait 3 milliards d’années (redshift z=2.16), c’est-à-dire au moment du pic de densité de formation stellaire dans l’Univers.
 
Le destin de ce proto-amas de galaxies est d'évoluer vers un système complexe similaire au super-amas de la Vierge, une structure massive de l'Univers local dont notre galaxie, la Voie Lactée, fait partie. Les observations de Planck laissent entrevoir un proto-amas avec un taux de formation d'étoiles prodigieux, dix mille fois plus élevé que celui de notre galaxie.
 
Des observations supplémentaires effectuées avec plusieurs télescopes terrestres et spatiaux, dont Herschel de l’ESA, ont confirmé son association avec deux fortes concentrations de galaxies. Chacune d'entre elles devrait s'effondrer dans environ 10 milliards d'années en un amas de galaxies dont le halo de matière noire aura une masse de 5 à 6×1014 masses solaires, soit l’équivalent actuel des plus grands amas de galaxies.
 
« Les 38 galaxies identifiées avec l'instrument MOIRCS sur le télescope Subaru à Hawaii », indique Y. Koyama, auteur principal de l'une des deux études, « sont les galaxies à formation d'étoiles qui contiennent le moins de poussières galactiques du proto-amas, mais il pourrait y avoir beaucoup plus de membres qui ont été manqués par notre sélection dans le domaine optique ».
 
« Nous estimons que le taux total de formation d'étoiles dans le proto-amas est remarquablement élevé, au moins 2200 masses solaires par an, et probablement deux fois plus, d'après le nombre estimé de galaxies obscurcies par la poussière qui n'ont pas été détectées par les observations optiques mais se révèlent dans l’infrarouge », affirme le Dr Mari Polletta (INAF & IRAP), auteure principale de la deuxième étude et qui a entre autre dirigé les observations au sol au Large Binocular Telescope Observatory en Arizona.
 
« Planck a détecté ces candidats proto-amas depuis l'espace il y a environ une décennie. Leur confirmation et leur étude ont nécessité du temps, de nombreuses observations avec d'autres télescopes et un travail acharné de la part des chercheurs et des étudiants », explique le Pr Hervé Dole astrophysicien à l’IAS (CNRS / Université Paris-Saclay) et co-signataire des deux études. « C'est une grande réussite de voir enfin l'un de ces proto-amas étudié en détail, mais de nombreuses questions restent ouvertes car ils remettent en cause les modèles de leur formation et en partie notre compréhension de la formation des étoiles dans les halos de matière noire les plus massifs de l'Univers lointain. La mission spatiale européenne de cosmologie Euclid, qui devrait être lancée en 2023, devrait permettre d’identifier d’autres structures de ce type, permettant ainsi de dégager des lois plus générales que celles fondées sur quelques cas individuels ».
 
D'autres campagnes d'observation sont en cours sur d'autres candidats proto-amas de Planck, notamment avec les télescopes millimétriques de l’IRAM. Ces premiers résultats s’insèrent dans un projet plus vaste qui consiste à mieux comprendre l'assemblage de structures massives telles que les proto-amas de galaxies, les mécanismes à l'origine de leurs taux de formation d'étoiles et l'interaction entre l'environnement dense et l'évolution rapide des galaxies qui habitent ces halos de matière noire.
 
 

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Région du ciel montrant le proto-amas de galaxies G237 lorsque l’univers était âgé d’environ 3 milliards d’années. À gauche : champ de vue de 11×11 arcminutes. A droite : zoom de 2.7×1.9 arcminutes. © ESA/Herschel and XMM-Newton ; NASA/Spitzer ; NAOJ/Subaru ; Large Binocular Telescope ; ESO/VISTA ; Polletta et al. 2021 ; Koyama et al. 2021.
 
 
Les laboratoires français impliqués sont l’IAS (CNRS/Univ. Paris-Saclay), l’IRAP (CNRS/Université Toulouse III – Paul Sabatier/CNES), l’IAP (CNRS/Sorbonne Université), le LAM (CNRS/Aix-Marseille Université/CNES), et le CRAL (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1/ENS de Lyon)
 
Références:

  • A Planck-selected dusty proto-cluster at z=2.16 associated with a strong over-density of massive Hα emitting galaxies, authored by Yusei Koyama, Maria del Carmen Polletta, Ichi Tanaka, Tadayuki Kodama, Hervé Dole, Geneviève Soucail, Brenda Frye, Matt Lehnert, Marco Scodeggio, 2021, MNRAS, 501, L1, https://ui.adsabs.harvard.edu/abs/2021MNRAS.503L...1K/abstract and https://arxiv.org/abs/2008.13614
  • Spectroscopic observations of PHz G237.01+42.50 : a galaxy protocluster at z=2.16 in the Cosmos field, authored by M. Polletta, G. Soucail, H. Dole, M. D. Lehnert, E. Pointecouteau, G. Vietri, M. Scodeggio, L. Montier, Y. Koyama, G. Lagache, B. L. Frye, F. Cusano, and M. Fumana, 2021, A&A, 654, A121, https://arxiv.org/abs/2109.04396

 
Autres communiqués d’institutions partenaires :

 
Contact à l’IAS : Hervé Dole

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