Protubérance
Structure brillante observée au-dessus du limbe solaire dans les raies chromosphériques telle H.

Une protubérance est une poche de plasma dense (1017 m-3) et froid (8000 K) dans la couronne solaire chaude et diluée. Elle apparaît brillante au-dessus du limbe car elle y absorbe et diffuse le rayonnement chromosphérique sous-jacent. Par le même processus, elle apparaîtra sombre sur le disque (on l'appelle alors filament).
Les formes torturées observées, et notamment la présence de longs fils parallèles et courbés, sont expliquées par la présence d'un champ magnétique plus fort que le champ coronal. Ce champ a un double rôle : par le courant et la force électromagnétique associés, il sustente la matière dense ; il bloque aussi la conduction thermique, et donc le réchauffement venant de la couronne, dans la direction qui lui est perpendiculaire.
Les meilleures mesures du champ magnétique dans les protubérances ont été faites au Pic-du-Midi par les Français J.-L. Leroy, V. Bommier et S. Sahal qui ont trouvé une dizaine de Gauss et aussi confirmé l'existence de deux types de configuration magnétique : l'une dite " normale " car les lignes de champ ont la même direction générale que dans la chromosphère ; l'autre " inverse " dans laquelle les lignes de champ ont la direction opposée.
On peut définir trois types de protubérances :
- les protubérances quiescentes, dont la durée de vie peut atteindre plusieurs rotations solaires. Leur morphologie est très variable et leur altitude est de l'ordre de 100 000 km; à très haute résolution spatiale, on distingue des fils verticaux. Elles sont situées à haute latitude, loin des régions actives. La configuration magnétique semble y être " inverse ".
- les protubérances de régions actives, dont la durée de vie est plus courte. Elles sont en général plus basses que les protubérances quiescentes et animées de vitesses internes, en particulier horizontales, importantes. La configuration magnétique semble y être " normale ".
- les protubérances éruptives, qui sont le résultat de l'éruption des précédentes. Elles s'élèvent verticalement à de très grandes vitesses (jusqu'à 1 000 km.s-1) et à des hauteurs de l'ordre du million de kilomètres.
Une protubérance éruptive est en général –mais pas toujours- associée à une éruption et à une éjection de masse : la masse éjectée profite en fait de la cavité laissée derrière l'onde de choc de l'éjection pour se propager dans la couronne.
La durée de vie d'une protubérance est difficile à évaluer car, chauffée, elle peut disparaître dans certaines raies " froides " pour réapparaître, intacte, quelques heures après.

Les filaments tracent les lieux oû s'annule la composante verticale du champ magnétique . Ces lignes neutres, qui n'ont rien de lignes droites et ne sont pas toujours remplies de matière, existent un peu partout sur le Soleil. La migration des filaments de basse latitude vers les pôles (filaments polaires) trace en fait le lent mouvement des polarités magnétiques qui conduit au renversement cyclique de polarité du champ magnétique global.

La formation des protubérances fait l'objet d'un débat encore vif : la matière vient-elle de la photosphère-chromosphère, aspirée par exemple par un effet de siphon ; ou résulte t-elle d'une condensation (et refroidissement) de la matière coronale ? Les abondances mesurées indiqueraient plutôt une origine chromosphérique mais les observations simultanées entre le "sol" (la raie H par exemple) et l'espace (dans les rayons X avec YOHKOH par exemple) montrent l'existence d'une cavité coronale au-dessus des couloirs de filaments. Le processus de formation est assez complexe : il faut distinguer les changements de structuration magnétique du processus de remplissage par la matière, qui peut prendre quelques jours.